Cette séance sera présentée par Carolina Ariza.
Le 6 novembre 1985, la Plaza de Bolivar fut témoin de l’un des chapitres les plus sombres de l’Histoire récente en Colombie : celui de la prise d'otage des membres de l'institution judiciaire au sein du Palais de Justice de Bogotá par trente-cinq guérilleros du Mouvement de libération M-19, suivi, le lendemain, par la reprise militaire du lieu qui a tourné au massacre et au cours de laquelle fut exterminé le corps judiciaire du pays ainsi que des centaines de civils innocents. Cet événement majeur, qui a plongé le pays dans l'instabilité politique, fut fondateur pour de nombreux artistes colombiens comme José Alejandro Restrepo, Doris Salcedo, Carlos Castro ou encore Beatríz González qui se sont emparés de la Plaza de Bolivar à de nombreuses reprises pour la convertir en un véritable théâtre d’opérations collectives de construction de la mémoire en Colombie.
À partir des plusieurs oeuvres et actions de deuil réalisées par des artistes sur la Plaza de Bolivar, qu’il s’agisse de José Alejandro Restrepo, de Doris Salcedo, de Beatríz González, d’une intervention moins connue de Carlos Castro intitulée El que no sufre no vive (Celui qui ne souffre pas ne vit pas, 2010), ainsi que plus récemment, des Acciones por el acuerdo (Des actions pour l’accord) pilotées par Felipe Arturo, nous évoquerons ces moments artistiques de réappropriation de l’espace public qu'est la Plaza de Bolivar, devenue un véritable théâtre d’opérations collectives sur la mémoire en Colombie.
Née à Bogotá (Colombie), Carolina Ariza a étudié à l’Ecole des Beaux Arts de Paris entre 2001 et 2005. Elle termine actuellement un doctorat à Paris 1 intitulé « Images latentes : tentatives de reconstitution de la petite histoire » qui traite de la façon dont les artistes se sont emparés de l’écriture de l’histoire en Colombie et dans d’autres contextes politiquement instables, en réinventant des méthodologies propres à l’art. Elle est notamment auteur de textes parus dans le catalogue de l’exposition America Latina Photographies 1960-2013 (Fondation Cartier, novembre 2013-avril 2014) ainsi que du texte « Geografías desechas: sobre el dislocamiento de los espacios y las cosas » (Géographies désuètes : sur la rupture des espaces et des choses) paru dans le catalogue de l’exposition Próximo Futuro (Fondation Gulbenkian, Lisbonne, juin 2014). Elle a été enseignante dans le programme de Master sur l’Amérique Latine à l’IESA Arts et Culture en 2016, responsable de la section Amérique Latine dans les Solo Projects de la Foire SWAB à Barcelone en 2014 et 2015 ainsi que chargée de recherche pour l’Amérique Latine au Centre Pompidou au sein du projet Recherche et Mondialisation dirigé par la conservatrice Catherine Grenier en 2011.
Le séminaire « Politiques de la résistance : tactiques et stratégies artistiques en Amérique latine (Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Mexique) » est conçu et organisé par Laurence Corbel dans le cadre du programme de recherche ECCO AMLAT : « Écritures et paroles d’artistes : contributions aux scènes artistiques contemporaines d’Amérique latine ».