Les lesbiennes sont elles invisibles dans l'espace public ?
Ce programme part des acquis des recherches précédentes sur la visibilité et le processus de territorialisation des gays dans l’espace public littoral (les plages) pour se concentrer, dans une approche comparative, sur la population lesbienne. Si pour la population gay on peut parler de processus de territorialisation, pour les lesbiennes cela doit être nuancé. Les entretiens menés dans le cadre de la recherche SAD PRIDGENR (février-septembre 2012) auprès d’un échantillon de la population lesbienne bretonne ont montré l’intériorisation des pratiques et des comportements qui caractérisent l’expérience des femmes dans les espaces publics. Les lesbiennes interviewées ont déclaré ne pas concevoir la plage comme un espace « safe », dans lequel elles pourraient se montrer librement et se sentir elles-mêmes, car « la plage est quand même un espace dehors ». En partant de ce constat, on cherchera à comparer les pratiques des lesbiennes avec le processus de territorialisation des gays et la sociabilité masculine homosexuelle à la plage. En tant qu’espace lié au tourisme et du loisir, consacré à des expériences de rupture avec les routines quotidiennes, la plage représente par excellence un lieu de suspension de la norme. Elle permet de voir les usages et pratiques ainsi que les performances mises en acte. Lieu de dévoilement des corps qui sont contraints le reste du temps, mais aussi lieu ouvert en principe à tous les publics, la plage constitue une scène où les acteurs sociaux prennent place et se montrent en fonction de leur perception du contexte législatif et moral, des regards des autres et des risques encourus. Elle permet donc de voir in situ des rapports entre catégories d’acteurs largement définis par leurs regroupements (répartition par cooptation) et le régime des apparences vestimentaires et corporelles. De plus, la plage étant un espace public généralement d’accès gratuit, l’étude permettra de donner des éléments de réflexion sur la question de l’impact des niveaux de revenus et de pouvoir d’achat plus faible des lesbiennes par rapport aux gays.