Représentations du vieillissement chez les étudiants en médecine
En France comme dans les autres pays développés, l’espérance de vie ne cesse d’augmenter. Cette augmentation de l’espérance de vie, combinée à un indice de fécondité bas, entraine mécaniquement un vieillissement de l’âge moyen de la population. Les personnes de 60 ans et plus pourraient ainsi représenter un tiers de la population française en 2060. L’âge constituant un facteur de risque important pour de nombreuses pathologies (cancer, maladie d’Alzheimer, dégénérescence maculaire, ostéoporose...), les étudiants actuellement en faculté de médecine sont et seront amenés à soigner de nombreuses personnes âgées malades.
Or ces étudiants sont comme tout un chacun exposés à une culture âgiste, où beaucoup éprouve de « la révulsion envers l’avancée en âge ». En d’autres termes, ils peuvent avoir des stéréotypes négatifs envers la personne âgée. Des études ont montrés que la force d’association du stéréotype « vieillir est mauvais » est parmi les plus fortes qui soient, plus fortes par exemple que les stéréotypes liés à la race ou au sexe. Ces stéréotypes favorisent les discriminations, comme le montre une enquête européenne, l’eurobaromètre, rapporte que les discriminations en rapport avec l’âge sont les plus fréquentes.
En santé, ce type de vision liée aux personnes âgées et au vieillissement en général pourrait être un facteur explicatif de certaines constatations comme par exemple, la tendance à ne pas reconnaître et donc à sous-traiter les troubles dépressifs chez les adultes âgés ou encore l’exclusion des personnes âgées cancéreuses des essais cliniques.
Au-delà des attitudes discriminatoires, les stéréotypes ont des conséquences directes sur les personnes concernées, qui ont tendance à s’y conformer. Cela peut biaiser les tests de mémoire ou d’autonomie chez des personnes âgées. Il suffit au praticien de faire peser dans son attitude ou dans son discours la menace du stéréotype « vieillir c’est perdre sa mémoire » ou « vieillir c’est perdre son autonomie » pour voir confirmer son hypothèse. Le médecin, lui-même porteur de stéréotypes âgistes, peut donc facilement fragiliser un individu âgé en portant sur lui un regard témoignant du fait qu’il le considère comme étant fragile.
Ainsi, le futur médecin doit-il apprendre à se défendre en premier de lui-même, ensuite de l’ensemble des professionnels qui comme lui ont vu au cours du temps leurs stéréotypes se renforcer. Pour cela il faut qu’il puisse avoir conscience de leur existence et de leur effet, travailler à renforcer au contraire les stéréotypes positifs (« vieillir c’est acquérir de l’expérience »...). Une meilleure connaissance de la prévalence de ces stéréotypes chez les étudiants et de leur évolution au cours des études de médecine est un préalable indispensable à la mise en place d’action visant à les contrer. Nos travaux ont pour but de mesurer la force des stéréotypes âgistes explicites et implicites chez les étudiants en médecine de le 2ème à la 6ème année, d’analyser leur évolution avec l’avancée des études et de rechercher d’autres facteurs qui pourraient y être associé.